De transformation et de croissance
Géante, infatigable travailleuse, leader dans la lutte contre une centrale à charbon qui menace l’environnement et leur source de revenus.
Cette femme d’une cinquantaine d’années, mère de six enfants travaille depuis qu’elle a quitté l’école secondaire.
Située dans la région de Dakar, la ville de Bargny abrite une population de pêcheurs agriculteurs. Les habitants se consacrent à l’agriculture lors de la saison humide et à la pêche lors de la saison sèche.
Comme toutes à Bargny, elle commence sa journée de travail très tôt en pleine saison de pêche. Partie la veille, la pirogue familiale est signalée aux environs de Joal à 7 heures. Elle vient l’attendre vers 8 heures. Elle n’a pas pu acheter beaucoup de poissons le jour précédent des autres pirogues, car les pêcheurs vendent en priorité aux membres de leur famille. Ensuite, elle se rend sur le site de transformation pour contrôler le travail de ses aides et rencontrer les acheteurs.
Elle s’est fermement engagée dans le combat contre les problèmes environnementaux de sa région, car il y a beaucoup de projets économiques et industriels qui affectent négativement l’hygiène de vie de la population, surtout la construction d’une centrale à charbon qui suscite une forte opposition locale. Outre son impact sur le réchauffement climatique dont souffre déjà la zone, la centrale menace de pollution l’ensemble de la ville de Bargny. Le secteur de la pêche est particulièrement touché.
Ce sont les associations de femmes qui luttent le plus contre cette centrale qui empiète sur un terrain jusqu’ici occupé par la communauté de femmes transformatrices de poissons et donc menace directement leur site de transformation.
Fatou est présidente de l’Association des femmes transformatrices de poissons qui regroupe plus de douze présidentes de zone, car leur site de transformation est très étendu et il s’agrandit chaque année. C’est une activité primordiale pour les familles, bien souvent c’est la principale source de revenus quand le mari pêcheur est à la retraite ou qu’il n’y a pas de garçon assurant la relève.
Fatou Samba : « Les Guinéens, les Maliens, les Burkinabés viennent acheter nos produits parce qu’ils n’ont pas d’océan. »
En 2015, lors du blocage des frontières à cause du virus Ebola, elle a perdu toute sa production et la croissance de son entreprise a été stoppée net.
La vie est difficile, les saisons de pêche sont aléatoires et le poisson se fait rare.
Pour être plus efficace dans ce combat difficile, Fatou a voulu un temps s’engager comme politicienne, elle est devenue conseillère municipale, mais comme elle le dit « Le jeu politique veut que l’on mente et triche. Je préfère la lutte sociale pour l’intérêt de ma communauté. »
Elle constate amèrement que pendant les élections présidentielles de 2019, les candidatures des femmes ont été écartées d’une façon ou d’une autre, que quand elles sont membres de partis, elles sont reléguées au second plan. Et pour fonder leur propre parti, il leur faudrait beaucoup d’argent à distribuer comme c’est la mode actuellement en politique. Des obstacles insurmontables !