Fatou Kiné Dieng

A propos de Fatou Kiné

“perdre un pied n’est pas un handicap, c’est perdre la tête qui est un handicap”. Si Dieu te permet de bien utiliser ton cerveau, il faut en profiter pour être utile à tes proches et à ta population. 

Après mon éducation coranique, la présidente de l’association des handicapés moteurs, madame Dieye est venue chez moi pour demander la permission à ma mère de me laisser intégrer l’association car cette dernière aide des gens qui sont dans la même situation que moi.

Ma mère lui répondit qu’elle m’a donné l’éducation qu’il faut donc elle me fait totalement confiance, où que j’aille, elle aura l’esprit tranquille car une personne en situation de handicap puise sa force dans sa famille avant d’aller vers l’extérieur. J’ai fait plusieurs formations. J’ai fait une formation en coiffure, en batique, en savonnerie, en crochet. Je faisais tout ce qu’on pouvait faire avec la main. Je participais à toutes les formations qui m’intéressaient. Alhamdoulillah, j’ai vu les résultats. 

Avant de faire la coiffure, j’étais partie faire une formation en coiffure parce que je suis ambitieuse. Pour moi, tant qu’il y’a la vie, il y’a espoir et j’ai écrit une lettre à Mme Aminata Mbengue Ndiaye et je l’ai moi-même amenée. À l’époque, il n’y avait pas d’ascenseur, j’avais ma chaise roulante. Après avoir salué le gardien, je lui ai fait savoir que je voulais voir Aminata Mbengue Ndiaye et il demanda comment j’allais faire pour monter avec ma chaise roulante parce qu’il y avait pas d’ascenseur. Je lui ai demandé de m’indiquer son bureau et de m’amener ma chaise devant son bureau et j’ai rampé jusqu’au secrétariat. J’y ai trouvé un certain Séne qui m’a bien accueilli. Je lui fait savoir que je voulais voir Aminata Mbengue Ndiaye, il me répondit qu’elle était absente et je lui disais que je ne voulais plus y revenir vu que le bâtiment ne disposait pas d’ascenseur et c’était pas facile pour moi d’y accéder. C’est là qu’il m’a demandé ce que je voulais. Je lui ai dit que je voulais suivre une formation et j’ai écrit une lettre à Aminata Mbengue Ndiaye. Il me répondit que mon vœu allait se réaliser parce qu’il ferait le nécessaire.

Heureusement, Aminata Mbengue Ndiaye a reçu la lettre et m’a appelée. Elle m’a dit qu’elle était prête à m’aider et que je pouvais faire la formation que je voulais. C’était une excellente nouvelle pour moi. Après cela, je suis partie chercher un centre de formation. Mais les centres que j’ai vus n’étaient pas accessibles pour moi. Par la suite, on m’a indiqué une école sur la route de Front de terre qui est l’école internationale de coiffure. Quand j’y suis allée, j’ai demandé à voir la directrice. Ils m’ont dit qu’il fallait parler à la secrétaire d’abord mais j’ai refusé. La directrice a eu l’humilité de descendre mais quand on voit que tu es une personne en situation d’handicap, ils ont tendance à croire que tu ne vaux pas grande chose et que tu ne ferais rien de grand. J’ai dit à la directrice que je venais de la part de Aminata Mbengue Ndiaye puisque dans votre école les salles sont en bas et puis adaptées à ma situation. A l’époque, j’étais trop ravissante et j’avais de longs cheveux. Je me coiffais toute seule. Elle me demanda qui t’a coiffé. Je lui répondis que j’ai l’ai fait moi même. Elle rétorqua que c’était pas la peine de venir faire une formation et que je pouvais travailler chez moi puisque j’avais un don. Je lui répondis que je le savais parce que j’y gagne ma vie mais c’est le diplôme que je veux. Elle m’a répondu que j’ai raison mais qu’elle ne prend pas les personnes en situation d’handicap. J’ai pas pipé mot et je suis retournée voir Aminata Mbengue Ndiaye pour lui faire part de la nouvelle. Avec l’éducation que j’ai reçue, j’avais la conviction que je ferai partie de celles qui vont développer mon pays. Rester sans rien faire n’allait pas m’arranger alors j’ai acheté des fils et j’ai commencé à faire du crochet. À chaque fois, je perfectionnais mes crochets. C’est en ce moment que Mme Dieye m’a mis en rapport avec Annette Mbaye Derneville.

A cela s’ajoute la formation en micro jardinage que je devais faire.

Le premier jour où je suis partie voir Tata Annette M Derneville, elle s’est dit, à première vue, mais pourquoi madame Dieye m’envoie celle. Comment elle va s’y prendre ? Alors, elle m’a mis ensemble avec des femmes et des garçons. Feu Gouda Ba était notre professeur et comprenait bien ma situation. Je préfère laisser quand je sais que je ne vais pas y arriver. Alors je me suis donné corps et âme pour y parvenir. 

Le premier jour, on a fait notre théorie. Le lendemain on devait faire la pratique. J’étais la première à mettre ma table et j’ai fini avant les autres. 

Je n’ai jamais abandonné, j’ai continué jusqu’à la fin de la formation. 

Dans la foulée, Dieu a fait que des partenaires étaient venus au centre. Madame Dieye me demande d’intégrer le groupe de celles qui font la coiffure puisque c’est ma passion. J’en suis sortie major. Ensuite, on nous propose de faire une formation de renforcement des capacités. La directrice de l’école internationale de coiffure qui avait refusé que j’intègre son école était celle qui devait nous la faire. Cependant, c’était les encadreurs qui venaient au centre. Parmi les encadreuses, il y en avait une qui ne croyait pas à la réussite des personnes en situation de handicap. Je l’étonnai tellement parce qu’à chaque fois qu’on faisait un devoir de coiffure, le lendemain je venais avec la même coiffure. Elle me demandait de surveiller les élèves au lieu de faire l’examen. Je lui ai répondu que j’étais là-bas pour me perfectionner et avoir mon diplôme, que j’étais dans l’apprentissage. Le jour de l’examen, la directrice était invitée. L’examen portait sur deux têtes qu’on devait coiffer de 9h à 11h. Quand les examinateurs sont arrivés, la directrice de l’école de formation internationale de coiffure demanda qui avait fait ces deux têtes ? Je lui répondis que c’était moi. Elle demanda à l’encadreuse pourquoi deux têtes à coiffer dans un seul examen. Elle lui a répondu que les élèves l’avaient même surprise. C’est là que je leur ai dit qu’on voulait relever le défi car vous nous enseignez mais vous ne croyez pas en nous. Alors voilà le résultat. 

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