De ténacité et de brio
Géante humble, féministe et combattante pour les droits humains en général et les droits des populations.
L’école a été le moteur de la réussite de Ndèye Fatou Touré, née à Kaolack, au centre du Sénégal, en 1960, dans une famille d’enseignants. « J’étais une jeune fille timide qui ne faisait que travailler. Pendant les vacances, je n’avais d’autre activité que de rester à la maison, de lire et d’écouter de la musique… » À la faveur des affectations de son père, inspecteur du primaire, elle a pu connaître très jeune différentes régions du pays. Ce qui a contribué à renforcer son esprit d’ouverture, de tolérance et de respect d’autrui qui lui avait déjà été inculqué par ses parents.
En 1979, Ndèye Fatou entre à l’université. « J’étais passionnée par le droit. Il m’arrivait même de rater des cours magistraux pendant deux jours pour assister à des procès criminels. Et j’en frémissais… »
À l’épreuve probatoire de l’examen d’aptitude au stage du Barreau de novembre 1984, elle fut la seule femme sur prés d’une centaine de candidats ; elle eut la chance d’être cooptée et choisie par le prestigieux bâtonnier de l’époque Fadilou Diop, elle intégra son Cabinet et fut sa dernière stagiaire jusqu’en octobre 1986, veille de la naissance de sa fille ainée. Jeune maman, elle poursuivit sa collaboration avec le Cabinet, avant de parfaire sa formation à l’Étude de Maitres Bacar Waly NDIAYE (ancien Président de la Commission aux Droits de l’Homme des Nations Unies), Birame Sassoum SY, Bocar LY.
Elle fut initiée et pratiqua ainsi le droit des affaires à travers le contentieux de cinq compagnies d’assurance et de trois banques.
En 1985, peu après avoir prêté son serment d’avocate, Ndèye Fatou Touré a ouvert la porte d’abord de l’Association des Juristes Sénégalaises (AJS), puis de l’Association des Jeunes Avocats et pris sa carte à Amnesty International en même temps qu’elle s’intéressait beaucoup
aux travaux du Comité Sénégalais des Droits de l’Homme. « Je suis profondément féministe d’abord, et contre toute injustice, profondément attachée à la protection des droits des personnes vulnérables. C’est plus fort que moi. À chaque fois que je suis devant une injustice flagrante, je suis portée à faire du volontariat pour y mettre fin, quel que soit le sexe de la personne qui en est victime. D’ailleurs, ceux qui me connaissent vraiment restent toujours de marbre lorsqu’ils m’entendent me plaindre des servitudes de ma profession qui nous imposent des sacrifices de tous ordres, parfois démesurés ».
En côtoyant des juristes militantes comme Mame Madior Boye, Dior Fall Sow, Habibatou Diallo Guèye, elle a développé son penchant pour la défense des droits humains et des intérêts individuels. Elle se constitue avocate de la défense parfois gratuitement pour fournir une assistance judiciaire à des personnes démunies devant la loi.
Aussi, elle fait partie de la défense de l’ancien maire de Dakar, Khalifa Sall, pour faire respecter le principe d’égal traitement devant la loi des justiciables.
En 2007, Ndèye Fatou Touré est élue députée à l’Assemblée Nationale pour le compte du mouvement citoyen « Tekk i » conduit par Mamadou Diallo. « Je me suis alors évertuée à montrer qu’une femme en politique peut faire même mieux que certains hommes et qu’elle peut répondre, autant que faire se peut, aux problèmes des populations. » Elle a inscrit sa législature sous le signe de la défense des droits civils, économiques et sociaux de ses concitoyens. C’est ainsi qu’elle interpellait sans relâche, différents ministres et premiers ministres de la République, en particulier ceux en charge des secteurs de l’Énergie, de l’assainissement, du développement rural, de l’économie et des finances, etc. au cours des cinq années pendant lesquelles elle a siégé à l’Assemblée Nationale, en se documentant par ses propres moyens à la source et en se formant, entre autres, en matière financière et budgétaire, etc..
Elle fit de même, pour les inondations de la banlieue en photographiant, au jour le jour, les endroits de certaines communes les plus atteintes par les eaux, sortant de son rôle de juriste pour renforcer son expertise sur des questions techniques. Elle avait en tête d’assurer le contrôle des politiques publiques mené par l’exécutif, pour le compte des populations. Elle a aussi veillé sur les Droits Humains, en s’occupant par exemple, de l’engorgement des prisons. Elle saisit à maintes reprises, le ministre de la Justice notamment, après une tournée dans les établissements pénitentiaires de cinq régions afin de l’amener à résoudre les cas de détention provisoire de trop longue durée.
En entrant en politique, elle voulait qu’on prenne en compte la spécificité des femmes notamment dans les budgets sectoriels des politiques publiques. Mais au bout de cinq années, elle a préféré retourner à sa vie professionnelle, car les batailles politiciennes l’éloignaient de son objectif d’être au service des populations pour faire valoir leurs droits, qui doivent être mieux garantis par des normes suffisamment protectrices, mieux respectés par des mesures non équivoques et réalisés de manière effective.
Ndèye Fatou a multiplié les certificats en droit international des droits de l’homme (DIDH), droit international humanitaire (DIH) et droit international pénal (DIP). Elle détient six certificats décernés par l’institut international des Droits de l’Homme de Strasbourg, Fondation René Cassin, le Centre Person des Nations Unies pour le Maintien de la Paix, l’Association International des Avocats de la Défense (AIAD) afin d’être prête à intervenir dans les mécanismes de justice africaine de défense des droits de l’homme, car étant inscrite sur la liste des conseils de la CPI depuis trois années.